Ce que “accès au droit” veut dire

Mohamed Sellame est juriste à Droits d’urgence. Il revient sur le principe d’accès au droit, et sur son métier.

Dans notre pays, l’idée de justice, et pas uniquement l’idéal de justice, imprègne toute notre Histoire. Nos révolutions ont posé les bases et les principes fondamentaux de notre droit pour tous. L’institution de l’aide juridictionnelle a voulu ouvrir notre justice aux plus démunis d’entre nous. Et ce fut un grand pas, socialement.
Il restait à poursuivre ce travail afin de rendre concret, réel, notre Etat de droit. Devant l’inflation des législations, des normes, le langage quasi sorcier et la complexification de ces dernières, l’engorgement des juridictions et le coût, de plus en plus lourd, financièrement pour nos concitoyens, il fallait inventer le principe de l’accès au droit. Sans lequel l’État de droit serait vain. Ou réservé aux initiés et/ou aux « riches ».

Un État de droit réservé aux initiés, aux riches

Depuis 1995, notre association intervient pour offrir ce service d’accès au droit. Un service d’excellence. Qui n’a rien à voir avec une sorte de  » bricolage du droit ». Bien au contraire, notre association, avec tant d’autres, prouve tous les jours la pertinence d’un tel dispositif. Au point que j’ai pu rencontrer, dans le cadre de nos actions, des magistrats venus de Corée du Sud, du Japon, d’Argentine et du Burkina Faso, se familiariser avec l’idée de l’accès au droit. C’est dire à quel point cette idée doit dépasser nos frontières (…).

Une idée qui doit dépasser les frontières

L’accès au droit est un service rendu pour le bien commun.

Nous tentons, chaque jour, d’apporter des solutions juridiques, rappelons aux uns et aux autres leurs droits et leurs obligations ; nous favorisons, parfois, la recherche de solutions négociées, de médiation et de conciliation, en étroite collaboration avec les divers intervenants au sein des structures d’accès au droit (services sociaux, conciliateur, délégué du Défenseur des droits, sans oublier les auxiliaires de justice : avocats, huissiers et notaires).
D’une certaine manière, nous allégeons l’engorgement de nos juridictions et le fardeau de nos magistrats en redonnant souvent confiance dans nos institutions. En informant, accompagnant dans le droit et avec le droit nos concitoyens. Sans pour cela créer une sous-catégorie de justice réservée aux « pauvres et exclus » de notre société. Notre métier de juriste permet d’accomplir cette noble mission de solidarité. Il convient de valoriser nos postes et notre statut de juriste pour toujours plus d’engagement. La solidarité passe par le contact humain. J’espère que nos partenaires et nos financeurs prendront la pleine mesure de l’impérieuse nécessité sociale de poursuivre leur soutien à nos actions que je considère vraiment comme « d’utilité publique ».

Droit, devoir, solidarité d’utilités publiques… pour toujours plus d’engagement

Oui, nous exerçons un beau métier. Totalement désintéressé et au profit des autres, toujours. C’est un bonheur immense de lire, chaque jour, dans le regard de ceux qui viennent nous consulter l’immense reconnaissance après leur avoir indiqué un chemin et une solution en réponse à leurs difficultés qui leur paraissaient insurmontables.